[Échanger] Maladies tropicales d’aujourd’hui, des maladies européennes de demain

Rencontre avec Ronaldo de Carvalho, Chaire de professeur Junior, 2022. Laboratoire IHPE (UMR 5244 UM-CNRS-IFREMER-UPVD)

  • Le 1 nov.
 

Comment êtes-vous arrivé à Perpignan ?

Ronaldo de Carvalho : Olá, salut, hello ! Pendant mon doctorat, j’ai participé à un congrès international au Brésil où j’ai rencontré un doctorant canadien de l’UPVD. À l’époque, nous étions tous les deux intéressés par nos projets respectifs : je présentais mon projet de doctorat relatif aux stratégies de lutte contre les escargots vecteurs, et il présentait son projet de doctorat relatif à la description épigénétique des parasites du schistosome.

Après presque deux ans d’échanges de mails, j’ai reçu le soutien financier des autorités scientifiques brésiliennes pour me rendre en France pour la première fois et apprendre les techniques de protéomique et de transcriptomique pendant six mois. Cette expérience a été d’une valeur inestimable pour mon doctorat et a complètement changé la trajectoire de ma carrière. à la fin de mon stage, j’ai été invité à postuler pour un poste de postdoc dans le même groupe de recherche à l’IHPE-UPVD. J’ai passé trois ans en tant que postdoc à Perpignan avant de poursuivre ma carrière à l’ENS-Lyon et plus tard à l’Université de l’Utah aux États Unis.
 


Quels seront les axes de votre recherche pendant que vous serez titulaire de la chaire junior ?

RdC : Mon principal projet de recherche, intitulé « Maladie tropicale d’aujourd’hui, maladie européenne de demain : une approche de biologie des systèmes pour comprendre, prédire et contrôler leurs émergences », a été lancé pour étudier l’impact des changements mondiaux sur l’émergence de parasites et de vecteurs tropicaux dans les régions tempérées. Avec mon equipe à l’IHPE, nous étudierons les liens entre le changement climatique, la qualité de l’eau douce et le développement des parasites, en nous concentrant sur les maladies parasitaires transmises par les escargots.

Pour atteindre cet objectif, nous utiliserons une approche intégrative qui s’étend du niveau moléculaire au niveau de l’écosystème, cherchant à prédire la virulence des parasites tropicaux dans le contexte des changements climatiques mondiaux.

Le projet est structuré en quatre objectifs. Le premier est d’établir des collaborations internationales pour caractériser l’environnement de terrain dans les pays endémiques et en France afin de comprendre les similitudes et les différences de qualité de l’eau douce qui pourraient affecter le développement de la maladie parasitaire. Des collaborations seront établies avec des pays tropicaux endémiques, dont le Brésil et les pays africains de langue portugaise (PALOP - Nations Unies), tous endémiques pour la schistosomiase. Le deuxième objectif est d’identifier les paramètres environnementaux qui déterminent la plasticité du parasite et la compétence de l’hôte intermédiaire dans les écosystèmes naturels. Le projet quantifiera, expérimentalement, l’influence des caractéristiques environnementales sur les stades parasitaires en eau douce et sur la biologie des escargots en collaboration avec des institutions françaises telles que l’INP Toulouse et l’Université de Montpellier. Le troisième objectif est de déchiffrer le support moléculaire de la plasticité parasitaire et son impact sur la réponse immunitaire des hôtes définitifs. Nous utiliserons des approches multi-omiques unicellulaires à haut débit pour décrire l’effet des caractéristiques environnementales sur le développement et l’immunité du parasite chez les hôtes définitifs. Le quatrième objectif est d’utiliser des approches de biologie des systèmes pour révéler les interactions entre l’environnement, l’hôte et le parasite. Grâce à des séries itératives de développement de modèles, de tests et de comblement des lacunes par des données expérimentales, nous affinerons les modèles afin de fournir des prédictions qui pourront finalement être utilisées pour identifier les caractéristiques environnementales qui propagent de manière fiable les maladies parasitaires transmises par les escargots dans un contexte de changement climatique.

Cette approche nécessite l’établissement de collaborations interdisciplinaires efficaces, la construction de données multi-omiques et informatiques intégrées pour étudier comment le cycle de vie du parasite et la réponse de l’hôte évoluent conjointement, car la compréhension des deux est cruciale. Le projet vise à contribuer au développement de stratégies de contrôle et de prévention des maladies tropicales dans les régions tempérées, afin de préserver la santé publique et de promouvoir le bien-être mondial.
 

Le projet vise à contribuer  à la préservation de la santé publique et à la promotion du bien-être mondial.


Quels sont les résultats attendus ?

RdC : Ce projet a le potentiel de créer de vastes ensembles de données qui établissent un lien entre les sources de pollution de l’eau douce et la virulence des maladies parasitaires tropicales. Ces ensembles de données peuvent être utilisés pour reproduire et développer nos recherches en France et dans d’autres pays où ces maladies sont endémiques. Notre réseau de collaboration national et international mettra ces ensembles de données à la disposition du public. À terme, nous espérons que les résultats de notre projet auront des répercussions sur la santé publique, l’environnement et d’autres questions de société, et qu’ils pourront donner lieu à des recommandations politiques ou à des modifications de la réglementation. À cette fin, nous nous engageons à collaborer avec les décideurs politiques pour veiller à ce que les résultats de nos recherches se traduisent par des politiques efficaces qui profitent à la société.


Que vous apporte la chaire Jr. en tant que jeune chercheur ?

RdC : Il s’agit d’une occasion unique pour moi de poursuivre ma carrière en tant que chercheur principal en dirigeant une petite équipe d’étudiants en doctorat et de post-doctorants dans l’étude d’un sujet qui me fascine depuis mes études de doctorat au Brésil : comment les indices environnementaux façonnent la coévolution hôte-parasite ?
Ce projet basé dans l’un des plus prestigieux laboratoires d’étude de la schistosomiase au monde, offre la plateforme idéale pour créer des réseaux de collaboration clés et continuer à développer mes compétences.

De plus, le soutien financier fourni par l’ANR-CNRS-UPVD permettra à mon équipe d’utiliser des approches globales pour améliorer notre compréhension de la façon dont les cycles de vie du parasite et les réponses de l’hôte évoluent conjointement, ce qui nous aidera finalement à contrôler les maladies émergentes.


 

Les chaires de professeur junior (CPJ)

Deux des 16 laboratoires de l’UPVD se sont vus attribuer par le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, une chaire de professeur junior.

Les chaires de professeur junior (CPJ) sont attribués par le Ministère de l’Enseignement Supérieure, de la Recherche. Elles sont destinées aux jeunes scientifiques présentant un fort potentiel d’encadrement et d’animation d’équipe de recherche, ainsi que des capacités à participer à des projets nationaux, européens ou internationaux. Les CPJ constituent une nouvelle voie de recrutement sur projet de recherche et d’enseignement.


Mise à jour le 18 mars 2024
https://www.univ-perp.fr/kit-de-communication/actualite/maladies-tropicales-daujourdhui-des-maladies-europeennes-de-demain